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- W2040967536 abstract "Dans le Sahel, entre la Mauritanie et la Somalie incluant le Nord Kenya, environ 20 à 30 millions de personnes vivent en transhumance. Le rythme de leur migration suit l’évolution saisonnière du climat et la disponibilité des ressources, telle que l'eau, le pâturage et le sel. Malgré une exposition élevée à certaines maladies comme les zoonoses et les problèmes conditionnés liés au climat, les pasteurs mobiles sont parmi les populations quasiment exclues du système de santé, car la mise à disposition des services sociaux adaptés à un mode de vie mobile est difficile. Suivant l'objectif de recherche d'un meilleur accès aux soins des pasteurs mobiles, l'Institut Tropical et de Santé Publique Suisse, en partenariat avec plusieurs institutions dans la région, est actif au Sahel depuis 15 ans, aussi bien dans le domaine de la recherche, que celui des actions de développement. Basées sur une approche orientée vers les besoins des pasteurs mobiles pour leur développement, des recherches interdisciplinaires ont contribué à mieux comprendre la situation et les problèmes des éleveurs. En relation de la proximité entre l'homme et son bétail, une approche unissant la santé humaine et animale s'est avérée bonne et la valeur ajoutée d'une meilleure collaboration entre médecine humaine, animale et l'environnement a été démontrée. Ces approches utiles devraient être poursuivies et consolidées dans les recherches et le développement des actions futurs. Le pastoralisme mobile est un mode de vie et de production animale hautement adapté à un environnement qui ne pourrait pas être utilisé autrement dans plusieurs régions du monde (Prior 1994). Dans le Sahel, entre la Mauritanie et la Somalie incluant le Nord Kenya, environ 20 à 30 millions de personnes vivent en transhumance. Le rythme de leur migration suit l’évolution saisonnière du climat et la disponibilité des ressources (Bille 1997). L'une des parties la plus importante de la vie des pasteurs mobiles est de garantir le bien-être de leur bétail. Le bétail n'est pas seulement la base de leur vie et leur source principale de revenu, mais il définit aussi leur statut social et est de ce fait à la base de la reconnaissance et du respect (Krönke 2000; Schelling et al. 2008). Afin de trouver les ressources nécessaires pour leur bétail, les pasteurs du Sahel sont nécessairement mobiles. Avec le début de la saison des pluies, ils se déplacent avec leur bétail au nord en suivant les pâturages verts. Ainsi, ils arpentent souvent plusieurs centaines de kilomètres en saison des pluies et en saison sèche (Weibel et al. 2008). Les itinéraires qu'ils prennent et les distances qu'ils parcourent dépendent de leurs droits d'accès et d'usage mais aussi de la disponibilité des ressources clés pour les humains et les animaux. Ces ressources clés sont pour le bétail des riches pâturages, des terres contenant du natron (bicarbonate de sodium) et de l'eau. La mobilité des pasteurs et leur proximité avec le bétail se répercutent sur leur état de santé (Figures 1 et 2). En effet, comme pour les autres propriétaires de bétail dans des zones rurales et péri-urbaines, la proximité des animaux et la consommation de lait cru favorisent les infections zoonotiques comme l'anthrax, la brucellose, la fièvre Q et la tuberculose bovine (Schelling et al. 2003; Daugla et al. 2004; Wiese 2004; Diguimbaye-Djaibe et al. 2006). De plus, les pasteurs mobiles sont peu protégés des influences environnementales qui compromettent leur santé (Figure 3) comme la forte humidité en saison des pluies aussi bien que la chaleur caniculaire et la poussière en saison sèche (Bechir 2000). En dépit de ces risques élevés, les pasteurs nomades ont à peine accès aux services sanitaires, car ceux-ci ne sont pas adaptées aux besoins des éleveurs et ne sont pas conçues pour un mode de vie mobile (Wyss et al. 2004a). Bien que la population sédentaire a aussi des difficultés à accéder aux services sanitaires, l'accès des pasteurs nomades à ces services est considérablement plus problématique (Wiese et al. 2004a). Les systèmes de santé les plus appropriés et économiquement les plus avantageux pour des éleveurs mobiles ont rarement été discutés. Par contre Loutan (Loutan 1989), dans son importante analyse souligne la nécessité d'une formation en santé humaine et animale désectorisée, en collaboration avec les services vétérinaires, car la majorité des éleveurs y compris les femmes, ont de très bonnes connaissances de la santé de leur bétail. Beaucoup de gouvernements africains ne mettent pas l'accent sur le potentiel des éleveurs mobiles comme secteur productif du développement économique. L'introduction des systèmes adaptés d’éducation et de santé est une condition sine qua non pour la participation des populations nomades au développement durable. Néanmoins, il y a un manque de volonté politique de mettre en place des services sociaux adaptés aux besoins des pasteurs mobiles. Vu que les pasteurs mobiles ne bénéficient presque d'aucun service social, entre les communautés de pasteurs mobiles et les structures de l'Etat, les relations sont souvent très faibles et marquées par une méfiance mutuelle. Les pasteurs mobiles sont mal représentés dans les institutions d'Etat et ne possèdent guère d'influence politique (Zinsstag et al. 2006). Les nomades ont très peu d'accès à l’éducation et sont ainsi souvent illettrés (Krönke 2000; Zinsstag et al. 2002; Zinsstag & Yosko 2004; Bechir 2010). Comme ils se trouvent régulièrement à des endroits éloignés, ils ne sont pas touchés par des interventions nationales pour le développement (Zinsstag et al. 2006). En plus de l'accès limité aux services sociaux, les conflits entre les pasteurs mobiles et la population sédentaire posent des grands problèmes. En effet, l’évolution saisonnière des précipitations demande une grande flexibilité des pasteurs mobiles dans leur choix des aires de séjour. Le changement climatique augmente davantage la variabilité des précipitations ce qui nécessite souvent un changement de parcours de la transhumance. Aussi, la pression démographique entraîne une augmentation de la concurrence pour les ressources existantes (Bechir 2010). En absence d’une législation précise sur l’aménagement foncier, des conflits entre les agriculteurs et les pasteurs nomades se produisent fréquemment (Krönke 2000). A ce jour, certains pasteurs nomades possèdent des terres, alors que traditionnellement ils profitaient d'anciens droits d'usage pour accéder aux pâturages. Aujourd'hui, ces droits sont souvent déclarés nuls et ne sont plus respectés. Les points d'eau sont souvent entourés par des champs cultivés appartenant aux agriculteurs sédentaires. Ainsi le bétail des pasteurs mobiles n'a pas d'autres choix que de traverser ces champs pour se rendre aux points d'eaux, ce qui occasionne des dégâts pour les agriculteurs. Les pasteurs nomades doivent dans ce cas payer des amendes élevées et des compensations souvent exagérées (Krönke 2000). Les pasteurs mobiles sont considérés comme riches à cause de leur bétail et beaucoup de sédentaires essaient d'en profiter (Fokou et al. 2004). Ainsi, mis à part les redevances légales, les pasteurs nomades doivent aussi effectuer le paiement de redevances farfelues (Bechir 2010). Suivant l'objectif de recherche pour un meilleur accès aux soins des pasteurs mobiles, l'Institut Tropical et de Santé Publique Suisse, en partenariat avec le Centre de Support en Santé International (Tchad), le Laboratoire de Recherches Vétérinaires et Zootechniques de Farcha (Tchad) qui est aujourd'hui devenu l'Institut de Recherches en Elevage pour le Développement (IRED), et des partenaires en Éthiopie, au Mali et en Mauritanie, est actif au Sahel depuis 15 ans, aussi bien dans le domaine de la recherche, que celui des actions de développement (Tanner 2012). En commençant par le Tchad, le travail c'est, au fil des années, élargi à la Mauritanie, au Mali et à l'Ethiopie. Il s'agissait d'abord de mieux connaître la situation des éleveurs mobiles et leurs besoins. Jusque là, peu de choses étaient connues sur la santé et la démographie des nomades de l'Afrique de l'Ouest et Centrale, car ils sont mobiles, dispersés, et se trouvent le plus souvent à des endroits éloignés des centres urbains. C'est ce qui rend leur recensement plus difficile, mais pas impossible (Schelling et al. 2003). Cependant, les recherches ont été conçues dans un sens qui répondait aux besoins des pasteurs mobiles et des exigences d'interventions pour transformer le plus vite possible les nouvelles connaissances de la recherche en outil de développement. Les priorités de la recherche et du développement ont été définies au cours des ateliers avec les décideurs et les communautés cibles. Cette approche participative a réuni de façon répétée les représentants des nomades, des autorités et des chercheurs pour cibler les problèmes principaux afin de mieux concevoir, planifier et évaluer la recherche et les interventions à venir (Wyss et al. 2004b). Des équipes de recherches pluridisciplinaires, composées de médecins, vétérinaires, biologistes, géographes et anthropologues ont essayé de comprendre la situation et les besoins spécifiques des pasteurs nomades. Afin d'en savoir plus sur la santé des nomades, il a été conduit d'une part, des analyses épidémiologiques et d'autre part des études anthropologiques et culturelles pour mieux comprendre leurs concepts de la santé, leur perception de la maladie et leur compréhension de la vie aussi bien que leur recours aux soins en cas de maladie (Krönke 2001; Münch 2012). Ainsi, la prise en compte complémentaire de la perspective observatrice et descriptive et les perceptions des communautés concernées a reçu une attention particulière. De cette manière il a été observé que les Kel Alhafra (population Touareg au nord du Mali) considèrent que le corps humain est soumis à deux sortes des forces, les forces froides et les forces chaudes. Quand les forces sont en équilibre, le corps fonctionne parfaitement et est en bonne santé. Cette balance est influencée par l'environnement, les conditions de vie, la nourriture et les maladies. Quand cette balance est déséquilibrée, c'est à dire que soit les éléments froids ou les éléments chauds prédominent, cela résulte en une maladie. Ainsi, les Kel Alhafra classifient les maladies en deux catégories distinctes, froide et chaude dépendant si elles sont causées par une dominance des éléments attribués à une des catégories. La classification d'une maladie détermine aussi, comment elle est traitée (Münch 2012). En comparaison, les Fulbés du Tchad sont attachés à un système de normes et de valeurs « Poulakou » qui leur demande un autocontrôle fort et où il n'est pas bien vu de montrer ses malaises en public (Krönke 2004). Ainsi on peut constater que les populations réunies sous le terme de pasteurs mobiles représentent une grande diversité ethnique et culturelle. La mise en place des services sanitaires devrait en conséquence être adaptée pour répondre au contexte géographique, sociale et culturel (Tanner 2012). A cause de la proximité entre l'homme et son bétail aussi bien que de l'importance du bétail dans la vie des pasteurs, une approche unissant la santé humaine et animale dénommée « une seule santé » ou « one health » en anglais a été choisie comme base conceptuelle de recherches et des interventions. « one health » est un concept qui a pour but de démontrer de manière quantitative et qualitative la valeur ajoutée d'une meilleure collaboration entre médecine humaine, animale et l'environnement (Zinsstag et al. 2010). Ceci implique de prendre en compte simultanément la santé humaine et animale au niveau des pathologies, des individus aussi bien qu'au niveau de la communauté et de son environnement naturel et culturel (Zinsstag et al. 2009). Suivant cette approche, et l'observation que plus de bétail était vacciné que d'enfants, des campagnes de vaccination conjointes humaines et animales ont été conçues au Tchad. Ces campagnes conjointes, effectués par des professionnels de santé humaine et animale, permettaient l'accès à la vaccination pour les enfants de moins de 5 ans et les femmes en âge de procréer. Elles ont permis de faire une économie de 15% de coûts par le partage du transport et de la chaîne froide (Bechir et al. 2004; Schelling et al. 2007, 2008). La majorité des études se faisaient en étroit partenariat de recherches nord-sud (www.kfpe.ch). La collaboration et les échanges fructueux entre les organisations et les chercheurs du Nord et du Sud facilitaient d'un côté des résultats plus pertinents à travers un apprentissage mutuel et de plus contribuaient aux renforcements des capacités et institutions de recherches africaines. Dans une étude réalisée en 1999/2000, plus de mille pasteurs mobiles ont été examinés au Tchad afin de déterminer les problèmes principaux de santé. Il a été constaté que la grande majorité des pasteurs mobiles présentait des troubles de santé (Daugla et al. 2004; Schelling et al. 2005). En effet, ils ne consultent les centres de santé que très rarement, souvent seulement dans un état de maladie très avancée; les malades restent trop souvent non traitées. En Mauritanie, une forte mortalité infantile est observée chez les nomades (Ould Taleb 2008). Au Mali également, un taux de mortalité infantile élevé est constaté et la probabilité qu'un nouveau-né survit sa cinquième année n'est que de 72% (Münch 2012). Bien que l’état de santé des pasteurs mobiles soit à beaucoup d’égards comparable à celui de la population sédentaire pour des maladies comme la malaria et les infections parasitaires (Bechir et al. 2012a), des facteurs de risque s'ajoutent pour les nomades avec le proche contact du bétail et la consommation de lait cru typique pour des éleveurs, ce qui favorise les infections zoonotiques. Une étude menée au Tchad chez l'homme et le bétail en même temps, a fait observer une faible prévalence humaine de la brucellose (4%) et de la fièvre Q (1%), malgré que 7% des bovins ont été détectés séropositif à la brucellose et 73% de dromadaires à la fièvre Q. Cependant le lien entre ces maladies chez l'homme et le bétail était statistiquement significatif (Schelling et al. 2004). En Éthiopie du sud-est, 1,4% des bovins et 9,6% des chèvres étaient séropositifs à la brucellose et 90% des dromadaires séropositifs à la fièvre Q (Gumi 2011). Dans une enquête menée au Tchad, la majorité des nomades déclarait consommer du lait cru et d'avoir des contacts avec les déjections corporelles provenant des avortements des animaux, ce qui sont de facteurs à risque pour une infection (Schelling et al. 2003). Les travaux d'obstétrique effectués sur les animaux principalement par les hommes pourraient expliquer le fait que ceux-ci sont plus souvent touchés par la brucellose que les femmes (Schelling et al. 2003). Les pasteurs mobiles ont des bonnes connaissances des maladies animales et de leurs voies de transmission, par contre leur savoir sur la santé humaine est faible (Münch 2012). Les rapports entre la santé humaine et animale ne sont que peu considérés (Krönke 2004). Mais aussi leur exposition aux conditions climatiques extrêmes, les rend plus vulnérable à certaines maladies (Bechir 2000). Au cours de la saison sèche, la chaleur et la poussière abondante se manifestent souvent par des infections respiratoires (Wiese et al. 2004a). Les maladies pulmonaires se déclarent le plus fréquemment chez les enfants de moins de 5 ans (Schelling et al. 2005). Au cours de la saison de pluies, de fortes fièvres et des diarrhées fébriles se manifestent le plus souvent car l'accès à l'eau potable est plus difficile (Daugla et al. 2004; Schelling et al. 2005). Pour l'accouchement, les femmes ne fréquentent que très rarement les centres de santé et des examens prénataux ne sont quasiment jamais effectués (Münch 2012). Les femmes et les enfants ont une couverture vaccinale très faible (Bechir et al. 2004). Basé sur une des premières études au Tchad qui constatait que le bétail était mieux vacciné que les femmes et les enfants, comme mentionné en haut, des campagnes de vaccination simultanées pour les humains et les animaux ont été développées et effectuées (Bechir et al. 2004; Zinsstag et al. 2005; Schelling et al. 2007). Un des grands problèmes est la sécurité alimentaire (Figure 4), car l'alimentation est constituée surtout de lait et de céréales qui sont achetées par le produit de la vente du lait (Bechir et al. 2010; Münch 2012). La quantité du lait produit dépend de la disponibilité du pâturage pour le bétail. Moins il y a de nourriture, plus la production laitière est faible, ce qui rend la situation alimentaire des nomades extrêmement difficile, surtout à la fin de la saison sèche (Bechir et al. 2011). Cette situation peut être périlleuse, car il fait tellement chaud et sec que les nomades ont une consommation d’énergie élevée, tandis que le pâturage pour le bétail est rare et donc la production laitière diminue (Schelling et al. 2005). Ainsi, les pasteurs nomades réagissent très sensiblement aux variations climatiques et sont facilement vulnérable aux fluctuations des précipitations. Des études ont montré que beaucoup de femmes et d'enfants souffrent de malnutrition durant les années de sécheresse (Bechir 2010; Bechir et al. 2010; Münch 2012), au contraire, la sous-alimentation est rarement constatée au cours des années riches en pluie (Daugla et al. 2004; Zinsstag et al. 2010). Les fruits et légumes frais ne sont pas consommés, ainsi le lait reste pratiquement la seule source de vitamine A, ce qui peut résulter par des symptômes de carence (Zinsstag et al. 2002; Bechir et al. 2011, 2012b; Münch 2012). Un lien direct a pu être établi entre le taux de vitamine A dans le sang des femmes et du lait de leur bétail. Ainsi le taux sérique en vitamine A, comme paramètre de l’état de santé est déterminé, à travers le lait qui reflète le taux en beta-carotène de l'herbe fourragère, par la qualité de l’écosystème et des conditions climatiques (Zinsstag et al. 2002). Dans le cadre de programme de recherches, le premier laboratoire, capable d'isoler et de cultiver les mycobactéries a été établi au Tchad. Une étude clinique en milieu pastoral a démontré une prévalence de suspicion d'une tuberculose clinique de 4,5% (Daugla et al. 2004). Les premières souches de tuberculose humaine isolées au Tchad provenaient des institutions de N'Djamena. Ils étaient composés exclusivement de souches de Mycobacterium tuberculosis, dont 25% étaient résistant à l'isoniazid (Diguimbaye et al. 2006). Le cheptel bovin Sahélien est infecté par Mycobactérium bovis (Diguimbaye-Djaibe et al. 2006; Muller et al. 2008; Tschopp 2008; Tschopp et al. 2010; Gumi 2011), mais il est difficile de prouver sa transmission à l'homme, telle qu'il a été démontré chez des pasteurs mobiles Borana au sud-est de l'Ethiopie (Gumi 2011; Gumi et al. 2012). M. bovis en Afrique Centrale est dominé par des souches ayant une grande délétion génomique nommée Af1 (Muller et al. 2009). Des études de tuberculination du bétail ont montré qu'un seuil de 2 mm à la lecture est plus performant que celui recommandé par l'Organisation Mondiale de la Santé Animale (OIE) (Bongo Naré et al. 2009). Les pasteurs mobiles reconnaissent la tuberculose chez l'homme et leurs concepts correspondent avec la médecine moderne dans certaines limites. Cependant, des entretiens au Tchad et en Mauritanie révélaient qu'ils perçoivent la tuberculose comme héréditaire et inguérissable (Ould Taleb 2008). Ceci montre l'importance de combiner des études biomédicales avec des approches socioculturelles, afin de pouvoir identifier les barrières d'accès aux soins. Malgré les grandes différences entre les pasteurs mobiles, on peut généraliser qu'ils sont vulnérables et ont difficilement accès aux services sociaux de base à cause de leur mobilité et de leur dispersion mais aussi à cause des facteurs socio-économiques et culturels (Daugla et al. 2004; Yemadji 2004). Les offres de soins comprennent d'une part les soins informels et traditionnels comme les marabouts, les thérapeutes traditionnels ou les vendeurs non-autorisés des médicaments modernes et d'autre part les soins formels mis en place par l’état comme les hôpitaux situés majoritairement dans les grandes villes et les centres de santé dispersés dans les zones rurales. Cependant il y a un manque de couverture sanitaire dans les zones pastorales (Ould Taleb 2008). Bien qu'il existe des centres de santé, les pasteurs mobiles s'y rendent pour chercher de l'aide avec beaucoup d'hésitation, car les services offerts ne répondent pas à leurs attentes. Souvent ils se font d'abord traiter par des soins traditionnels ou informels ce qui mène souvent à un recours aux services des centres de santé dans un état de maladie grave et très avancée. Pour atteindre un centre de santé, les pasteurs mobiles doivent souvent parcourir de grandes distances (Ould Taleb 2008; Münch 2012). C'est donc un voyage long et difficile, qui est seulement possible avec une personne accompagnatrice en cas de maladie grave. Plus la distance est grande, plus longue est l'absence du campement et plus longtemps le bétail devra être confié à la garde de quelqu'un d'autre. Mais aussi la mobilité des campements pose des problèmes car elle rend les visites répétées pour suivre un traitement souvent impossible. Ainsi, le suivi des instructions des centres de santé est problématique (Ould Taleb 2008). Dans les centres, la communication avec le personnel est fréquemment mauvaise, car ils parlent des langues différentes (Hampshire 2002; Ould Taleb 2008). Les coûts élevés des traitements et des médicaments influencent négativement la visite des centres de santé (Ould Taleb 2008; Münch 2012). De plus, les pasteurs nomades doivent régulièrement payer des prix plus chers, car ils sont considérés comme riches (Wiese 2000; Fokou et al. 2004). A cela s'ajoute des coûts indirects comme le transport, l'alimentation et la prise en charge intermédiaire du bétail (Wiese et al. 2004b). Pour les femmes surtout, une consultation chez un médecin est difficile, car elles sont dépendantes du soutien de leur mari ou d'un membre de leur famille (Hampshire 2002; Münch 2012). Les hommes par contre ont un accès plus aisé à cause de leur mobilité. Les femmes pratiquent donc plutôt de l'automédication et ne consultent un centre de santé que tardivement (Ould Taleb 2008; Figure 5). En plus de toutes ces barrières, une fois que les pasteurs mobiles arrivent dans un centre de santé, il se trouve souvent dans un état techniquement inadéquat et mal équipé ce qui ne satisfait pas leurs attentes (Wiese et al. 2004a). Influencés par les défauts techniques, les coûts élevés, les longues heures d'attente et aussi les aspects interculturels, se traduisant par un manque de compassion de la part du personnel de santé, les pasteurs nomades se font une mauvaise opinion sur les centres de santé. Plus l'accueil et les traitements sont mauvais, moins grande est la probabilité qu'ils y reviendront. L'objectif de toute recherche sur les pasteurs mobiles doit être une amélioration de leur condition de vie (Obrist et al. 2007, 2010; Zinsstag et al. 2011). C'est pourquoi il est important que la recherche reste toujours orientée vers les besoins des éleveurs mobiles et du développement durable. Dans le cas des interventions futures, la recherche peut jouer un rôle important en accompagnant et en évaluant les actions afin de trouver et de résoudre les problèmes et les difficultés le plus rapidement possible aussi bien que pour mesurer le succès des interventions. Les informations sur la santé et la démographie des pasteurs mobiles sont très importantes afin de planifier, de réaliser et d’évaluer les interventions (Weibel et al. 2008). Cependant, des études à long terme sont difficiles à effectuer en milieu nomade car la composition des campements est très dynamique et il est presque impossible de retrouver les mêmes personnes (Schelling et al. 2003; Weibel et al. 2011). De ce fait, l'installation d'un système de surveillance démographique est fortement souhaitable. Des premiers essais utilisant des données biométriques comme des empreintes digitales se sont montrées peu pratiques (Weibel 2009; Weibel et al. 2011). Des nouveaux essais avec la téléphonie mobile sont en cours et les premiers résultats font preuve de son efficacité comme outil de surveillance démographique et de santé (Jean-Richard 2013). La téléphonie mobile a un potentiel énorme pour le suivi de parcours de transhumnance, la surveillance des maladies humaines et animales, la télémédecine, l’évacuation d'urgence et le suivi d'interventions de longue durée telle qu'une adaptation de la stratégie de lutte contre la tuberculose de l'OMS pour le milieu pastoral. Ainsi, un vaste champ d'action de communication, de surveillance et d'intervention s'est ouvert ce qui devrait aboutir à des nouvelles solutions pour une meilleure prise en charge des patients en milieu pastoral reculée. L'approche de la coopération Nord-Sud s'est avérée bonne, car elle a facilité la conception et la réalisation des projets de recherche. C'est pourquoi cette coopération devra être intensifiée, pas seulement entre les partenaires du Nord et du Sud mais aussi entre les chercheurs des pays du Sud. Pour prévenir des échecs, il faut essayer de part et d'autre de minimiser les écarts de pouvoir. Surtout quand le financement vient du Nord, il est indispensable que tous les partenaires soient inclus dans la planification de la recherche et des interventions et suivent la déontologie de la recherche en partenariat (www.kfpe.ch/11-Principles/). Plus le financement provient de l'ensemble des partenaires, plus l'engagement, l'appropriation et l'internalisation du projet au sein de chacun des ceux-ci sont mieux ressentis. Cette approche facilitera davantage l'appropriation et les préoccupations du projet par les parties prenantes. Pour assurer un développement fonctionnel et durable, l'approche participative et transdisciplinaire reste importante de manière à ce que les chercheurs, les autorités, et les éleveurs transhumants et nomades ou leurs représentants puissent communiquer, formuler leurs besoins et exprimer leurs critiques. Par l'inclusion des pasteurs mobiles dans le processus des planifications et de la réalisation des interventions, ils s'approprieront les interventions et assumeront de ce fait plus facilement leur responsabilité. Basé sur les connaissances de la recherche et sur les résultats des ateliers participatifs, un programme d'appui intersectoriel aux communautés d’éleveurs mobiles a été élaboré au Tchad, conçu pour une durée de 10 ans. Celui-ci a été formulé sous le patronage du Ministère de l'Economie et du Plan, et devrait améliorer simultanément la situation des pasteurs mobiles dans différents secteurs comme la santé, l’éducation et l'accès aux ressources. Malheureusement la mise en œuvre de ce projet n'a pas encore démarrée pour différentes raisons: absence de financement, implication de plusieurs Ministères, prise en compte de plusieurs facteurs en même temps, manque d'expérience et de culture dans la mise en œuvre de programme multisectoriel et un champ restrictif des actions de développement des partenaires financier. Certainement, des programmes similaires d'appui de longue durée aux nomades, exécuté par l'Etat, sont très désirables. Même si ces programmes peuvent être conçus et élaborés avec l'appui des ONGs ou des organisations internationales, c'est finalement l'Etat qui doit assumer la responsabilité de la mise en ceuvre de ce programme à grande-échelle. C'est uniquement de cette manière que la situation des éleveurs mobiles pourra être améliorée d'une façon durable. Pour cela, la volonté politique, mais aussi l'apport financier et l'appui administratif sont indispensables. Ainsi, dans les pays du Sahel, où l'Etat a déjà souvent des problèmes à fournir des services sociaux à la population sédentaire, il est particulièrement difficile d'initier et de financer des programmes de développement pour la population mobile. Même si ces programmes intersectoriels contribueraient à un développement durable pour les communautés nomades, leur initiation est longue et leur mise en place compliquée. Comme le montre l'expérience du Tchad, la réalisation d'un tel programme peut être longtemps retardée. Actuellement des réflexions pour la mise en place d'un programme plus spécifique focalisé sur la santé est en cours, ce qui sera plus facile à mettre en place et aura très probablement des meilleures chances de réalisation, malgré le fait que les résultats seraient moins complets qu'une approche intersectorielle. Cependant pour le cas du Tchad, en réalité l'approche multisectorielle rentre progressivement dans la vision de développement des hautes autorités du pays. Cette approche est vivement recommandée par le forum national sur le développement rural tenu en janvier 2012 à N'Djaména et lors de la fête de la transhumance organisée en novembre 2012 à Ouadi Djedid dans la Région du Batha. C'est ainsi qu'il est envisagé sur financement de l'Etat, la mise en place sur plusieurs sites en même temps de points d'eau, d'un centre de santé, d'une école, d'un centre vétérinaire, d'un centre de stockage des produits alimentaires et d'aliments de bétail et l’implantation des marchés. Des approches à moyen terme peuvent aussi être envisagées, du moins initialement, par des organisations internationales de coopération au développement en collaboration avec l'Etat. Ces approches incluent des interventions comme la réalisation des campagnes d'information, d’éducation et de sensibilisation pour informer les nomades sur l'existence, les symptômes et les voies de transmission des maladies chez les humains et les animaux. De cette manière, les comportements à risque ainsi que la transmission des maladies pourraient être minimisés. De plus, des campagnes de sensibilisation initiées par les centres de santé pourraient contribuer à améliorer la fréquentation de ces centres par les pasteurs mobiles afin qu'ils se fassent traiter plus tôt et plus facilement en cas des maladies graves. Ces genres d'approches devront se baser sur la participation des communautés, des autorités et des partenaires ciblant les facteurs d'accès et de résilience sociale, c'est-à-dire la capacité intrinsèque des communautés à faire face aux défis de santé et de bien-être. La recherche d'un meilleurs accès aux soins pour les pasteurs mobiles reste un défi pour une couverture équitable des soins. De plus, la formation d'agents de santé communautaires à savoir les infirmiers, les accoucheuses et les sages femmes ainsi que les auxiliaires d’élevage ou les agents vétérinaires seraient d'un grand secours. Ceux-ci viendraient des communautés nomades; ils seraient mobiles et accompagneraient les éleveurs mobiles ou appelés en cas de besoin compte tenue de leur proximité. Ils pourraient donc traiter les problèmes de santé quotidiens et contribuer à la prévention sanitaire à l'aide des nouvelles technologies de communication. Tout cela devient plus facile avec les nouveaux moyens de communication mobile et des GPS. La conception d’écoles mobiles ou d'autres formes d’éducation de base sont aussi capitale pour améliorer les capacités individuelles des éleveurs mobiles et consolider leur position dans la société. De plus, les efforts de créer des comités de médiation entre les agriculteurs et les éleveurs mobiles sont importants pour l'avenir, car ces deux groupes sont souvent en concurrence pour les ressources rares ce qui engendre des conflits. Ces échanges mutuels et réguliers peuvent aider à une cohabitation plus paisible. A cause de la proximité entre les éleveurs mobiles et leur bétail, la santé des deux ne peut pas être considérée séparément, car le bien-être des humains et des animaux est étroitement lié. C'est ainsi que pour des interventions dans le domaine de la santé, l'approche de « one health » est d’un grand atout pour la santé humaine et animale. Résultant de l'expérience de la recherche et des interventions des années passées, les avantages et les synergies de cette approche ont été prouvés. Ces connaissances peuvent aussi être transférées et utilisées à d'autres populations qui vivent en proche contact avec des animaux. Au-delà de « one health » qui est à la base d'une meilleure collaboration entre santé humaine et animale, des considérations environnementales et écologiques devront d'avantage être prises en compte en vue de la pression croissante sur les écosystèmes et de leurs services. Nous visons donc de plus en plus des approches d’éco-santé (www.ecohealth.net) qui prennent en compte la provision de soins dans un cadre d'un système socio-écologique durable. Ce travail à été soutenu par le Pôle de recherches nord-sud (National Centres for Competence in Research North-South) du Fonds National Suisse de Recherches Scientifiques (FNRS) et de la Cooperation Suisse (DDC)." @default.
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